Omar l'a tuée

Vérité et manipulations d'opinions. Enfin une information contradictoire sur l'"Affaire Omar Raddad".
«En 1894 on condamnait un jeune officier parce qu’il avait le seul tort d'être juif ; en 1994 on condamnait un jeune jardinier qui avait lâchement tué une femme âgée sans défense. En 1906 Alfred DREYFUS fut réhabilité alors que Omar RADDAD est un condamné définitif. Un était innocent, l'autre est coupable ». - Georges Cenci

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Préface ; extrait n°2

(...)
Mes ambitions professionnelles plus modestes et ma conception de mon devoir paraissaient imposer, sans connivence ni rupture, la recherche de la défense la plus utile aux intérêts du justiciable qui m’était confié : sans fuir ou taire systématiquement la vérité – conception semble-t-il aussi archaïque de nos jours que le fait d’avouer une hétérosexualité.

(...)
« C’est donc sans favoritisme excessif envers ces deux autres auteurs, que j’ai pu m’intéresser également à la lecture de :
- «L’affaire Omar Raddad, le dossier pour servir la vérité » de François Foucart, féru de Droit et de psychologie, pendant vingt-cinq ans chroniqueur judiciaire, qui, à la différence de bien d’autres auteurs et commentateurs, avait pris la peine de suivre les débats publics et que l’on a laissé si peu s’exprimer au cours de l’émission télévisée à laquelle il allait, par la suite, participer.
Enfin le livre de Monsieur Cenci, publié après avoir pris sa retraite, tout en continuant d’ailleurs à faire bénéficier le Service public de la Justice de son expérience, de sa compétence et de son dévouement dans la ville où il réside.
J’allais oublier, dans la nomenclature qui précède, un autre livre édifiant de l’auteur Jacques Vergés, intitulé : « Je défends Barbie » ; non pas, hélas !, la poupée du même nom mais celui que, par marque de respect (sic) l’auteur appelait Don Klaus et qui le lui rendait bien en lui servant du Don Jaime (Jacques en espagnol). Que de Dons !
Il s’agissait de l’officier nazi qui fut condamné pour crime contre l’humanité. Préfaçant ce livre, Jean Edern Hallier expliquait avoir connu Jacques Vergés depuis les années 1960. A propos des années 1970 et d’une longue période d’absence, celui-ci, interrogé autrefois avec insistance par Jean-Louis Remilleux, n’avait consenti à préciser ( ?) que : « Tout ce que je peux vous dire, c’est que je suis revenu de cette aventure mince, bronzé, aguerri. » Jean Edern Hallier paraissant vouloir enfin dévoiler quelque secret de polichinelle ajoutait dans sa préface : « Quand il disparut pour huit ans, en 1970, je le rencontrai successivement dans les maquis boliviens en 1973, chez les Khmers rouges et dans un bordel de Tel Aviv… Il ne me démentira pas. »
C’est de manière moins aventureuse et plus prosaïque qu’en l’année 1997 j’ai rencontré le capitaine Cenci dans la citadelle de Villefranche-sur-mer, au cours d’un congrès de criminologie auquel nous avions été respectivement conviés à participer. Ce fut une occasion de mieux nous connaître et d’échanger quelques souvenirs professionnels.
Il n’y avait pas, parmi les enquêtes parvenues à la Cour d’assises et effectuées par la brigade de recherches de Cannes qu’il dirigeait, que celle concernant le meurtre de Mme Marchal.
Nous avons ainsi pu évoquer ces investigations difficiles qui, après le piétinement de précédents enquêteurs d’un autre service, pendant quelques mois, suivi de leur dessaisissement, avaient dû être reprises par la brigade de recherches : elles concernaient le meurtre commis un mois environ avant celui de Mme Marchal, d’un homme de vingt-neuf ans, Farid R…, de nuit, par arme à feu – non retrouvée – et sans témoin direct ni mobile connu. Opérant avec astuce et ténacité, sous couvert d’une mission de sécurité d’un lieu public qui les conduisait à troquer l’uniforme contre le smoking – ce qui leur fut plus tard véhémentement reproché par la Défense – les gendarmes parvenaient à se familiariser avec le personnel et à obtenir de gens, jusque-là muets, que les langues se délient et que des confidences surgissent. De telle sorte qu’une scène d’altercation préalable au meurtre était reconstituée et un suspect identifié et arrêté. Il nia toute participation à l’altercation et au meurtre. Au terme d’une instruction et d’une enquête longues, minutieuses, accompagnées de mises sous écoutes téléphoniques, d’expertises diverses, le suspect fut renvoyé devant la Cour d’assises des Alpes-maritimes où, après des débats serrées et des affrontements tendus, il fut jugé et définitivement condamné pour ce crime.
Mais pourquoi s’attarder autant sur cette affaire ? Parce qu’elle montre, si besoin était, que cette brigade de recherches a déployé, pour élucider le meurtre du jeune Farid R… autant de zèle, d’efforts et de compétence que pour traiter l’affaire du meurtre de Mme Marchal.
C’était certes tout à fait normal, mais il n’est pas inutile de le rappeler compte tenu du dénigrement systématique et médiatique dont ont été abreuvés pendant des années cette unité de gendarmerie et son commandant.
Qui aurait pu en attester ? Pourquoi pas l’avocat des parties civiles, de la famille de Farid R…, le même qui coopéra par ailleurs activement à la demande de révision formulée dans l’affaire Marchal, ne se privant ni de déclarations à la presse ni d’agrémenter de son indéniable prestance, aux côtés de Me Vergés, les images télévisées de la salle d’audience de la Cour de révision…Je le crois pourtant assez intègre pour n’avoir pas chassé de sa mémoire les souvenirs de l’autre affaire.
C’est donc au cours de ce congrès de criminologie que le capitaine Cenci, ulcéré par les campagnes unilatérales, malveillantes et médiatiques qu’il continuait, comme d’autres, à subir dignement tout en étant contraint au silence, me fit part de son projet d’en sortir un jour pour remettre quelques pendules à l’heure et quelques faits en place. Il a su patiemment attendre encore cinq ans avant de le faire en rédigeant, puis en publiant son livre pour démontrer que son enquête n’avait été « ni bâclée, mal ficelée, orientée, tronquée ni truquée.»
Le magistrat instructeur en avait attesté dès le 10 juin 1992 auprès du commandant de la compagnie de gendarmerie de Cannes, par une lettre publiée en annexe du livre.
La suite est connue.
Les abus médiatiques et les tentatives de manipulation de l’opinion publique ont été dans cette affaire assez flagrants pour qu’on puisse aujourd’hui en prendre conscience, sans avoir à ouvrir d’interminables débats et polémiques sur l’indispensable principe de liberté d’expression, ses abus, ses dérives et ses éventuelles limites.
Qu’il soit dit cependant que nous connaissons dans la Presse et que nous avons rencontré au gré des affaires quelques grands chroniqueurs qui préconisent et pratiquent envers et contre tout une véritable et nécessaire déontologie. Je pense par exemple et de manière non exhaustive, sur le plan national à Monsieur Jean-Pierre Berthet et sur le plan local à Monsieur Maurice Huleu que j’ai eu le plaisir de rencontrer, à sa demande, l’an dernier, auprès du cinéaste Georges Lautner, pour commenter le film « Le 7ème juré », pour parler des Cours d’assises et de l’évolution législative en ce domaine. Mais ceci est une autre histoire…

Achevant d’exprimer ces souvenirs et réflexions, je réalise combien j’ai peu souligné la constance et la fidélité à leurs devoirs des jurés – femmes et hommes – et de mes collègues de cette Cour d’assises qui depuis huit ans ont dû subir sans broncher des commentaires ou des supputations souvent déplacés et parfois outrageants. Je leur rends ici l’hommage qu’ils méritent amplement et unanimement.
Je constate aussi combien, par souci permanent et peut-être excessif de neutralité, j’ai peu parlé de l’auteur et du contenu de ce livre, comme il est pourtant d’usage de le faire dans une préface. La lecture de cet ouvrage fait à mon sens ressortir le considérable travail de documentation, réalisé de manière chronologique par l’auteur et qui devrait permettre au lecteur attentif de formuler ses propres réflexions et opinions à partir des données précises et des réalités de l’enquête et non plus seulement au vu d’approximations littéraires ou de fictions médiatiques.
Quant à l’auteur je crois m’être montré trop avare des compliments que méritaient pourtant sa ténacité, sa droiture et son courage.
Dans notre pays de liberté et quand tout va à-peu-près bien, on aime rire au spectacle de Guignol assénant des coups de bâton sur les têtes de carton, de bois ou de plastique des marionnettes du juge ou du gendarme.
Sorti de ce théâtre et quand les choses vont moins bien, que les menaces et les dangers d’agressions se profilent à l’horizon, on songe alors davantage à se placer sous leur autorité ou leur protection et l’on s’avise soudain qu’il ne s’agit plus de marionnettes insensibles, mais d’êtres susceptibles de s’exposer intellectuellement, moralement ou physiquement au service de la Société et de ses libertés.
Cela devrait conduire chacun à plus de circonspection dans le traitement ou la considération qu’il leur réserve. Il ne me paraît pas utopique d’espérer de telles prises de conscience dans l’avenir.

Armand Djian
Président de chambre honoraire
Près la Cour d’appel d’Aix-en-Provence
Capitaine honoraire

(à suivre)

© Editions l’Harmattan

Georges Cenci

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